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ETAPE 7 : ITALIE
LA TOSCANE #2 : De Sienne à Acquapendente
LE LATIUM : de Acquapendente à Rome
De Sienne à Ponte d’Arbia (28km)
Une kyrielle de belles images pour cette étape exclusivement en campagne toscane.
Nous commençons ce lundi 23 août par une promenade de Sienne. Après avoir petit-déjeuné et trouvé un hébergement pour le soir, je me mets en route en laissant Monika qui me rejoindra à Ponte d’Arbia en bus.
Sortie de Sienne par une grande porte débouchant sur une petite route de campagne. Et là, la symphonie des paysages commence. Je m’arrête presque à chaque virage avec l’envie de tout prendre en photos. De plus, le ciel changeant, légèrement nuageux, puis couvert, menaçant et éclatant en orage, semble s’amuser à offrir toute une palette de variations de couleurs. Même la poussière soulevée par le passage des véhicules met sa touche artistique.
En chemin, à la pause, je rencontre un groupe de douze jeunes adultes de Milan qui marchent vers Rome dans un but d’intégration de certains d’être eux qui ont des problèmes à résoudre. Ils m’accueillent de façon très sympathique et je comprends mieux pourquoi la recherche d’hébergement ne s’améliore pas. De plus, ils me signalent la présence de punaises de lit et donc la fermeture de certaines auberges à San Quirico, la prochaine étape.
À l’arrivée presque simultanée à Ponte d’Arbia, un bel orage éclate et dure toute la soirée, nous enlevant toute velléité de sortir nous ravitailler. Je n’ai pas non plus le courage de passer des coups de téléphone pour la nuit prochaine. On verra…
De Ponte d’Arbia à San Quirico d’Orcia (30km)
Après le gros orage d’hier, l’atmosphère est plutôt de style hammam, très chaude et humide. L’ avantage étant que les chemins sont bien mouillés voire boueux, mais que nous ne « mangeons » plus de poussière. Nous partons de Ponte d’Arbia par le pont construit en 2016 pour les pèlerins et nous engageons dans de grands détours en « dos d’âne » assez physiques pour éviter la route très animée. Nous trouvons notre récompense dans de somptueux points de vue sous un ciel tourmenté.
À Buon Convento, le village suivant, nous faisons quelques courses. Puis c’est reparti jusqu’à Torrenieri. Nous rencontrons beaucoup de pèlerins à pied et à vélo car le tronçon Sienne-Rome est très fréquenté par les Italiens. Nous voyons même un équipage assez impressionnant formé d’un couple dont le mari tire un handicapé en fauteuil roulant accroché à son vélo. L’étape est certes jolie mais sans ombre car en grande partie dans le vignoble. Elle se termine par un grand tronçon sur route sans zone de sécurité pour piétons.
L’église de San Quirico d’Arcia nous accueille au son des Suites de Bach jouées au violoncelle par un jeune musicien asiatique. Moment de répit bienvenu avant d’affronter les affres de la recherche d’hébergement.
Pas de succès à l’Office du Tourisme, tout est plein et le Covid dicte sa loi des jauges. Pas question de prendre des personnes en plus. Nous ne nous décourageons pas après un nouveau refus dans un organisme possédant quatre hôtels dans ce village très touristique. Sac sur le dos, nous déambulons dans la rue principale quand Monika aperçoit un écriteau « Amis de la Francigena ». Là encore, pas de lits mais une aide précieuse qui nous oriente vers un B&B « Il Cedro » ayant encore une chambre.
Douche, lessive puis promenade et courses pour le repas du soir sous l’orage… mais dans la bonne humeur!
De San Quirico d’Arcia à Radicofani (35 km)
Ce mercredi 25 août je chemine à nouveau seule sur cette étape qualifiée de très difficile mais splendide. Elle est longue et comprend un dénivelé positif de 950m et négatif de 550m. Jusqu’à présent, la VF circulait dans la campagne toscane entre 200 et 600m. Aujourd’hui, nous allons sur des crêtes de plus de 800m. Il fait beau et relativement frais. Pas de ravitaillement en route mais des points d’eau.
Première difficulté après Bagno Vignoni et son ancien bassin de bain en plein centre-village, le pont est coupé. Aucun signalement ni déviation. Je m’engage donc avec deux autres pèlerins dans la descente et l’ascension des rives escarpées du fleuve heureusement presqu’à sec. Puis c’est une succession de montées et de descentes jusqu’à Radicofani. Une belle concentration de pèlerins et de touristes dans ce village haut-perché où ont séjourné Dickens, Montaigne et Chateaubriand.
De Radicofani à Acquapendente (18km à pied, 7km en bus)
Ce jeudi 26 août et soixantième jour de marche voit mes derniers moments en Toscane.
Quelques kilomètres après Radicofani, ce sera le Latium: changement radical au niveau de la végétation. Déjà, dans la première partie de l’étape, on voit un paysage plus agricole, des moutons, des arbres et des jardins. À partir de Ponte a Rigo, il y a même des champs de maïs.
Dernière photo de la Toscane à Torricella, petit hameau le long de la grande Via Cassia qui nous mènera pendant deux étapes à Montefiascone. À Centeno, porte du Latium, nous prenons le bus, gratuit pour les pèlerins car la route est trop dangereuse: étroite, pas de bas-côtés, beaucoup de circulation… Sept kilomètres plus tard, nous voici à Acquapendente dont la cathédrale du Saint-Sépulcre renferme une crypte impressionnante avec 24 colonnes ornées de chapiteaux du XIIe siècle.
De Acquapendente à Bolsena (21km)
Journée tranquille sur du plat pour la première partie jusqu’à San Lorenzo Nuovo: moutons, champs, plantations de jeunes noisetiers, récolte des pommes de terre.
À l’entrée de la ville, une Croix de la Passion de 1957 et une sculpture de Renzo Gallo, faisant partie d’une oeuvre en cinq épisodes pour agrémenter la Via Francigena dans cette région. Les cinq sculptures représentent les moments-clés du cheminement: Départ, Chemin, Rencontre, Direction, Témoignage (marcher, sentir, regarder).
Après San Lorenzo Nuovo, on entre dans une forêt appartenant à l’association Fondo Forestale Italiano qui l’a reçue en cadeau à l’état de taillis et qui s’engage à n’y couper aucun arbre dans un but économique. Elle est traversée par un sentier en lacets, étroit et escarpé, qui après une belle montée et une belle descente débouche sur un champ de noyers.
Puis c’est un grand chemin qui longe en le surplombant le Lago di Bolsena, déjà aperçu depuis San Lorenzo. On circule parmi les oliviers et les maisons isolées et/ou abandonnées. La nature y est généreuse et il n’y a qu’à tendre la main pour picorer mûres et raisin sauvage.
L’arrivée sur Bolsène se fait d’en haut, dans la vieille ville et l’on descend un chemin piéton bien raide pour atteindre le centre-ville plus moderne. Je loge chez les sœurs de Santa Cristina dans un dortoir impressionnant de 24 lits. Douche et direction lac pour un plongeon bien relaxant!
De Bolsène à Montefiascone (21 km)
Samedi 28 août : encore une petite étape en douce montée par un chemin traversant bois et champs d’oliviers en surplomb du lac.
Montefiascone s’enorgueillit d’être la ville du centième kilomètre avant le tombeau de Saint-Pierre. Le compte à rebours commence ici!
J’ai visité la vieille ville tranquillement sans sac sur le dos (laissé à l’Office du Tourisme) et sous mon parapluie. Et comme j’avais le temps avant l’arrivée à l’ostello n’ouvrant qu’à 15 heures, je me suis offert un repas au restaurant (le deuxième à midi depuis mon départ!).
Devant le Convento dei Cappuccini, Emilia et Michele attendaient déjà et nous avons décidé de faire deux étapes en une demain car on ne sait pas quoi faire de nos après-midi quand on arrive trop tôt. De plus, depuis deux jours, le temps est idéal pour la marche: ciel couvert et entre 19 et 24°…
De Montefiascone à Vetralla (35km)
En ce dimanche, le dernier sur la VF, deux étapes en une. D’abord en descente après Montefiascone, puis sur la Via Cassia antique bordée de plantations de kiwis et de champs . Arrivée à Viterbo dans un dédale de bretelles d’autoroute et, dans la montée vers le bourg, une drôle de sensation en passant devant le stade.
Viterbo est une vieille ville fondée par les Étrusques, puis conquise par les Romains et devenue siège pontifical en 1145. Beaucoup de grands monuments : palais papal, cathédrale, quartier médiéval etc…, le tout fléché par des balises « VF Monumentale ».
La deuxième partie de mon étape se poursuit sur une « Via Cava étrusque », un chemin profond et étroit taillé dans le tuff. Les « falaises » de chaque côté peuvent atteindre 15 mètres de haut. Impressionnant!
Puis c’est la campagne en petites montées-descentes au milieu des champs de choux, des oliviers, des petits chênes et de jeunes plantations de noisetiers. C’est une étape sans point d’eau ni ravitaillement. Il faut prévoir!!
Ce soir, nuitée au Monastère des bénédictines de Vetralla, situé déjà à deux kilomètres sur l’étape de demain.
De Vetralla à Monte Gelato (44km)
44 kilomètres! Je n’en reviens pas, je suis tellement pressée d’arriver que mes pieds s’emballent. L’humeur change, plus trop envie de flâner et surtout envie d’en finir avec cette recherche fastidieuse d’endroits pour dormir. À cette allure, j’espère arriver à Rome après-demain c’est à dire mercredi.
Belle première partie de parcours ce matin au départ de Vetralla par une belle grande forêt, puis un jeu de piste dans les immenses plantations de noisetiers afin d’éviter les routes très fréquentées. L’arrivée à Sutri se fait dans une forêt-fouillis le long d’un ruisseau qui me rappelait en miniature les Gorges de la Loue.
À midi, il est trop tôt pour s’installer, alors je téléphone pour trouver un hébergement au-delà de ce village. Je m’installe dans le parc archéologique en face de la nécropole étrusque et après 4 appels, je passerai la nuit à Monte Gelato à 20 kilomètres de là.
C’est reparti donc dans un paysage plus ouvert, moins ombragé et par ces pistes blanches en montée et descente. Il faut cependant reconnaître que les automobilistes sont la plupart du temps respectueux du marcheur et ralentissent, voire s’arrêtent, pour ne pas soulever trop de poussière.
La VF passe dans le très beau parc de la Treja et les cascades de Monte Gelato. C’est là que se trouve mon gîte, un pied à terre rien que pour moi, dans une grande propriété, mais sans repas ni petit-déjeuner.
Heureusement, j’ai mes réserves…
De Monte Gelato à La Storta (30km)
Je viens de calculer que depuis Montefiascone, j’ai déjà fait 109km. La borne 100km est donc un petit mensonge déguisé car elle concerne la distance par la route. En fait, il y a presque 130 km jusqu’à Rome!
Ce mardi 31 août, dernière journée complète sur la VF. Demain j’arrive à Rome.
Départ tardif à 7h30 pour une étape encore riche en petit dénivelé (600+/700-). Mais malgré la belle étape d’hier j’ai bien assuré, surtout dans les montées vers les villages perchés: Campagnano di Roma avec son étonnante église à plafond à caissons et son bel orgue, Formello et son centre historique et pour finir La Storta.
Beaux paysages encore aujourd’hui avec traversée de pâturages, de la vallée du Sorbo et du Parc régional du Veio. Des routes-pistes, des sentiers bordées de mûres, de grands espaces naturels et un circuit protégé…
Arrivée à La Storta chez les sœurs du Sacré Cœur et une dernière soirée en demi-pension…
De La Storta à Rome (31 km)… avec errance dans Saint Pierre
Jour 66, 1631km, ce mercredi 1er septembre voit mon arrivée à Rome.
Départ dans le tumulte de la Via Cassia, chargée d’immondices, sur des bouts de trottoirs aléatoires pendant 5 km.
Ensuite c’est le calme et la verdure du Parc de l’Insugherata. La VF est toujours bien balisée mais ça se gâte au Monte Mario où les panneaux sont vandalisés. Heureusement qu’il y a l’application. C’est dommage car c’est de là-haut que l’on a une belle vue plongeante sur Rome.
Après une belle descente en lacets, on entre au cœur de la ville et après une longue ligne droite, on arrive à la Place Saint Pierre. C’est un choc car elle est presque vide et tout un dispositif est mis en place comme dans les aéroports.
Voulant mon Testimonium, je m’engage donc dans le circuit mais arrivée au poste de détection, gros problème : j’ai mon couteau suisse et c’est strictement interdit. Impossible de passer! J’essaie d’expliquer que je viens de terminer la Francigena depuis Reims mais rien à faire: soit je jette le couteau, soit je renonce à ma validation et à l’entrée à la Basilique. Devant mon désarroi, un policier plus sympa m’explique que le gérant du kiosque de souvenirs un peu plus loin voudra certainement bien garder mon couteau. Effectivement…
Mais… une fois entrée sur place, il s’avère que la sacristie n’ouvre qu’à 16h, il n’est que 13h30 et je n’ai toujours pas d’accueil pour cette nuit.
Je laisse mon sac à dos à la garde-robe et me voici dans Saint-Pierre pour deux heures et demie. Tout ça pour avoir un bout de papier que, finalement, je dois remplir moi-même!!! Entre-temps, j’ai réussi à réserver un lit et j’arrive en compagnie d’Emilia et Michele à l’ospedale per I pelegrini où on vous lave un pied en signe d’accueil.
Fin de mon chemin, je ne reste pas à Rome car le but n’est pas de faire du tourisme.
J’ai rencontré plein de gens, affronté des difficultés, vu des paysages grandioses, ressenti de grandes joies, ressassé des souvenirs, posé des questions, observé des façons de faire, bénéficié d’aide désintéressée… J’ai de mon côté laissé mon empreinte auprès de gens qui m’ont accompagnée.
Merci à vous tous qui m’avaient suivie.
Et surtout à Éric qui a transmis tous mes comptes rendus, même quand ils arrivaient à trois ou quatre heures du matin.
Fin de la 7e et dernière étape